12 mars 2022 , Éditions Victor Gadoury et Alain Weil, Monaco . Collection Fernand David
La collection que j’ai l’honneur de présenter, en collaboration avec mes amis et confrères Pastrone, est une des plus belles qui m’ait été confiée dans ma longue carrière. C’est aussi une des plus mystérieuses. Elle appartient à deux sœurs qui sont, du coté maternel, les petites filles d’un collectionneur célèbre en son temps, Fernand David. Malheureusement, très peu d’informations sur la vie de ce numismate sont parvenues jusqu’à nous.
Curieusement, cette collection laisse une impression d’inachevé malgré la qualité et la rareté de ses monnaies. Elle semble avoir l’ambition de s’attaquer à un très grand nombre de domaines (monnaies antiques, françaises, étrangères, jetons, insignes, médailles, etc…) mais en laissant des vides inexplicables dans beaucoup d’entre eux. Ainsi, pour les monnaies antiques, la Grèce est quasi absente et la Gaule n’est représentée que par deux pièces alors que le monnayage romain impressionne avec sa longue suite d’auréi rares et superbes. Pour le monnayage féodal, la Lorraine brille de plus de vingt pièces d’or tandis que d’autres provinces sont très peu représentées ou même totalement absentes comme la Bretagne. On retrouve de telles bizarreries pour les monnayages d’or français et étrangers ainsi que pour les monnaies d’argent.
Bref, on peut se demander si Fernand David ne s’est pas trouvé à court de moyens en voulant trop élargir sa collection. C’est peu probable car il était un des propriétaires d’ « A. David Frères », manufacture extrêmement prospère de passementerie, dentelles et broderies. Les médailles de récompenses d’exposition internationale ou universelle attribuées à cette société témoignent de son importance et de sa notoriété : médaille d’argent de Paris en 1889, hors concours à Chicago en 1893, médailles d’or à Amsterdam en 1895, à Bruxelles en 1897 et à la grande exposition universelle de 1900 à Paris (groupe 13, classe 84 : Dentelles, Broderies, Passementeries).
Par ailleurs, sa collection était connue tant en France qu’à l’étranger. Le précieux petit guide des frères Gnecchi « Guida Numismatica Universale » le cite (p. 145) au coté du prince Napoléon ou du comte de Castellane comme un collectionneur ayant une « richissime collection de monnaies romaines, gauloises et françaises ». Dans notre pays, Fernand David ne semble pas avoir pratiqué une politique de secret comme le font de nombreux collectionneurs. Bien au contraire, en tant que membre actif de la Société Française de Numismatique (SFN), il y faisait souvent part de ses trouvailles et de ses recherches en confiant directement à Paul Bordeaux le soin de les présenter.
Les tables de la Revue Numismatique portent trace d’une vingtaine de communications. Dans l’une d’entre elles, est décrit un unicum : l’écu du Dauphiné aux insignes frappé en 1702. N’ayant pas trouvé cette monnaie dans la collection, je m’en suis ouvert à Christian Charlet avec l’espoir que ses connaissances encyclopédiques m’aideraient à trouver une piste. Je ne fus pas déçu car il me retraça, au bout de quelques jours, le parcours complexe de cette monnaie que Paul Bordeaux avait présenté à la S.F.N. en 1900. Après plus d’un demi-siècle, l’écu se retrouve à Londres dans la vente de la collection Wayte Raymond (1963) où il est acquis par Jean Vinchon pour le compte de Montalent dont la collection sera vendue par le même expert en décembre 1977. L’écu de 1702 sera alors acheté par la Banque de France pour sa collection où il se trouve actuellement.
Estimé de ses collègues collectionneurs, Fernand David était aussi respecté des savants numismates. Un charmant témoignage en est le courrier plein d’esprit que lui écrivit Adrien Blanchet en commençant sa lettre par ces termes « Mon cher Confère et ami ». Quand le président de la S.F.N. rendra compte de son décès, il soulignera « la plus grande modestie et l’obligeance inépuisable » d’un des plus anciens membres de la Société.
Quand au mystère de la composition de la collection, il a été levé grâce aux explications familiales faisant état d’un vol d’une grande partie des monnaies pendant la dernière guerre. Cette information révèle enfin la vraie nature de l’actuelle collection : Fernand David a, si j’ose dire, fait dans la dentelle pour constituer la collection originelle, il a sûrement acheté avec attention et raffinement les meilleurs exemplaires pour rechercher l’universalité, la beauté, la rareté. Et, malgré ses lacunes, l’ensemble proposé aujourd’hui est le parfait reflet de cet idéal numismatique que je vous invite à partager.
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